Une exposition revient sur l’incroyable effervescence artistique du Paris de l’entre-deux guerres.
Une célébration du métissage et de la découverte de l’Autre jusqu’au 14 avril 2024.
Bien avant l’arrivée des réseaux sociaux, des tendances étrangères franchissaient déjà nos frontières nationales en influençant nos modes de vies. Mais au début du XXème siècle, ce sont les artistes qui jouaient aux influenceurs. En véritables abeilles, ils transportaient leurs grains de pollens d’une fleur à l’autre, semant ici et là leur créativité, au grand bonheur du jardin culturel parisien.
Jusqu’au 14 avril 2024, le Petit Palais accueille l’exposition « Le Paris de la modernité, 1905-1925 », la dernière exposition en date sur Paris, la capitale étincelante des artistes. De la Belle Époque aux Années folles, cette fascinante exposition rassemble plus de 400 oeuvres d’artistes de rang mondial comme Pablo Picasso, Robert et Sonia Delaunay, Amedeo Modigliani ou encore Marcel Duchamp.
PICASSO, UN PEINTRE SOUS INFLUENCE
La visite s’ouvre sur le Buste de femme ou de marin (étude pour Les Demoiselles d’Avignon) de Pablo Picasso. Il est exposé aux côtés d’un masque de danse Gouro provenant de la Côte d’Ivoire, ancienne colonie française. L’étrange correspondance entre les deux portraits interpelle : visages allongés, arcades sourcilières marquées et bouche en cul de poule…
Si Picasso peint une femme ou bien un marin, impossible de savoir, et cette ambiguïté apporte une touche de modernité à un des genres picturaux les plus prestigieux de l’histoire des beaux-arts européens : le portrait. Alors que Pablo Picasso peint Les Demoiselles d’Avignon en 1907, la première exposition de sculptures africaines et océaniennes, elle, est organisée en 1916.
UN MÉLANGE ARTISTIQUE DES TRADITIONS ET DES GENRES
Picasso n’est pas le seul à s’inspirer d’autres écoles artistiques. Paul Poiret, célèbre couturier français et soutien majeur de l’émancipation féminine, il libère la femme du corset en 1906, s’est longuement inspiré de l’imaginaire orientaliste, un mouvement artistique né au XVIIIème siècle de la fascination de l’Occident pour les cultures du Maghreb et du Moyen-Orient.
Un souvenir de la mémorable fête « La Mille et Deuxième Nuit » organisée au sein de son hôtel particulier et pour lequel il avait conçu une panoplie de déguisements, apparaît dans l’exposition avec la tenue Minaret (1911). À côté, des dessins de Paul Iribe font allusion aux estampes japonaises avec leurs lignes simplifiées et l’usage exclusif de la couleur sur les silhouettes féminines.
À l’époque, Paris est une fête, et ce nouveau centre du monde séduit notamment des Américains qui fuient la ségrégation comme Joséphine Baker. Originaire de Saint-Louis dans le Missouri, celle qui a enflammé le monde du music-hall avec son jeu de jambes « en caoutchouc », emmène la danse charleston à Paris.
Cette danse fondée aux États-Unis dans les années 1920 par la communauté afro-américaine, conquiert le cœur des Parisiens avec ses mouvements de jambes spectaculaires sur des rythmes de « hot jazz » au Théâtre des Champs-Élysées.
« à L’ÉPOQUE, PARIS EST UNE FÊTE. LA VILLE SÉDUIT LES AMÉRICAINS QUI FUIENT LA SÉGRÉGATION, COMME LA MENEUSE DE REVUE JOSÉPHINE BAKER. »
Paris a en retour une influence majeure sur la création artistique du reste du monde à travers l’élaboration d’une nouvelle esthétique industrielle mais glamour appelée « Art déco ». Cette nouvelle école émerge au sein de l’Exposition Internationale des Arts Décoratifs et Industriels Modernes (1925), où cohabitent prouesses technologiques et créations avant-gardistes internationales.
Ce mouvement artistique revient à des lignes plus géométriques et épurées, évoquant la vitesse et la modernité d’un monde qui se reconstruit après-guerre. De nombreux artistes internationaux viendront s’inspirer de cette esthétique, à l’image de la statue du Christ Rédempteur de Rio de Janeiro, au Brésil.
Au plus proche de l’actualité créatrice flamboyante du début du XXème siècle, l’exposition souligne la contribution essentielle des créateurs étrangers à l’avant-garde parisienne qui se révèle, de fait, cosmopolite. Alors, il n’était jamais question de pureté ou d’appropriation culturelle mais d’une recherche artistique audacieuse et féconde. Au Petit Palais, Paris, « ville-monde », ressemble à un portrait de Picasso : plusieurs visages s’assemblent pour n’en former qu’un seul.
Nikita Dalla Vedova
La Perle
« Le Paris de la modernité. 1905 – 1925 »
Du 14 novembre au 14 avril 2024
Petit Palais – Musée des Beaux Arts de la Ville de Paris
Avenue Winston-Churchil 75008 Paris
petitpalais.fr
Instagram : @petitpalais_musee
