Au Théâtre le 13ème art, existe un monde pas comme les autres. Un monde où les cacahuètes peuvent faire trente centimètres de long, où Sherlock Holmes chine les promos dans les grands magasins, et le tueur de Scream débarque à tout moment. Mais avant tout, un monde où une légende épouvante les âmes anglaises. Celle d’une terrible bête assoiffée de vengeance : la chienne des Baskerville.
Il fait beau, il fait chaud, et pourtant… nous voilà une bonne soixantaine à être enfermés dans une même salle, attendant que le rideau se lève. Mais, dès lors que la lumière s’éteint pour nous laisser avec une voix nous contant la terrible légende de cette bête assoiffée de sang, nous oublions le soleil et Paris. Nous voilà à Londres, au 221 Baker Street, dans le mythique appartement du détective Sherlock Holmes et son acolyte, le Docteur Watson.
UN CABARET À L’ANGLAISE
Ainsi nous entrons dans ce récit tumultueux. Holmes, jouant du violon, aux côtés de Watson s’affairant sur un enquête et la logeuse Madame Hudson faisant le tour du salon avec difficulté. Aucun doute, nous voilà au cœur du roman d’Arthur Conan Doyle.
On s’attend alors à suivre une enquête complexe et ficelée, mais très rapidement, c’est par le rire et un rythme effréné bien loin des réflexions fleuve de Sherlock, que la pièce vient nous conquérir.
Si l’humour absurde et complètement décalé peut d’abord surprendre certains, les rires deviennent vite contagieux. À chaque nouvelle entrée de personnage, c’est une couche de folie et d’extravagance en plus, qui vient nous plonger encore un peu plus dans cette histoire, se faisant entrainer toujours un peu plus dans ce délire affriolant.
À chaque entrée de personnage, une couche de folie supplémentaire !
Jeux de mots, éternelles chutes de Madame Hudson, personnages typiques et coups de théâtre à répétition, les comédiens ne nous laissent aucun répit.
Dans cette énième investigation de Holmes et ses acolytes, aucun besoin de cogiter, juste de nos yeux ahuris et nos lèvres entrouvertes, dans l’attente du prochain rire, du prochain sursaut. On suit les personnages qui partagent avec nous l’hébétude, le regard béat et lèvres entrouvertes, on se régale de ce théâtre inédit à l’humour déjanté et aux allures de cabaret.
UN MÉLANGE DES GENRES
Car au-delà des rires et de l’absurdité de cette enquête, le metteur en scène, Gwen Aduh, vient faire quelque chose de plus grand encore dans cette pièce. Réveiller nos imaginaires endormis par les conventions théâtrales.
Gwen Aduh nous propose ici une mise en scène mêlant les genres et dont le plaisir se fait ressentir jusque dans nos sièges. Jeux de mots tirés par les cheveux, messages politiques, démolition de quatrième mur, second degré truculent, chants, danses, course poursuites, ombres chinoises et cabaret…Ou comment s’assurer qu’aucun spectateur ne piquera du nez.
On notera la performance des comédiens, qui pour certains enchaînent les changements de personnages dans un rythme affolant. La fiction elle-même ne cesse d’être remise en cause, décalée, parfois mise sur pause.
En somme, pas de règles, sinon celle de prendre un immense plaisir sur le plateau pour nous l’offrir à nous, spectateur. On touche peut-être là, à l’essence communicative du théâtre.
Alors, si parfois être bloqué à Paris sous un ciel bleu et un soleil de plomb peut vous déprimer, n’oubliez pas qu’il existe un monde où le voyage est infini. Un monde vibrant dont le théâtre le 13ème art nous propose une représentation aussi truculente et singulière : celui de l’imaginaire.