Maya Ruiz Picasso, la fille de… et plus encore

Le lien entre Pablo Picasso et sa fille était bien plus qu’une simple attache familiale. Il s’est révélé être une véritable source d’inspiration et la raison d’un renouveau créatif chez le peintre. Une exposition au musée Picasso de Paris rend hommage à cette relation singulière.

Illustration L’exposition recompose, dans un parcours mémoriel, les morceaux de vie et le lien partagé par le peintre et sa fille Maya (Crédits photo : Vue d’exposition, Musée Picasso Paris)

Maya Ruiz est née Picasso. Un nom qui fait d’elle la première fille du peintre le plus connu de l’art moderne. Sa naissance, en 1935, marque un bouleversement dans la vie de Pablo Picasso, lequel s’est traduit dans ses œuvres. L’exposition « Maya Ruiz Picasso : fille de Pablo » actuellement au Musée Picasso-Paris, recompose, dans un parcours mémoriel, les morceaux de vie et le lien partagé par le peintre et sa fille. Un regard qui s’inscrit dans la nouvelle programmation du musée, plus ancrée dans l’intimité du peintre.

MAYA LA MUSE

La naissance de Maya impulse une nouvelle énergie créative chez Picasso. S’il peint tous ses enfants et fait d’eux une source d’inspiration pour ses œuvres, Maya est une véritable muse pour lui et fait l’objet d’un traitement prolifique. Entre la seule période d’un an, de 1938 et 1939, Picasso peint quatorze portraits de la très jeune Maya.

Le lien entre l’enfant et son père est notamment lié au dessin. Maya pose pour Picasso, mais elle est aussi celle qui le pousse à la créativité. Ce renouvellement créatif se traduit par deux phases : celle où Picasso dessine tout ce que lui dicte sa fille et celle où il crée des jouets pour elle. Cette seconde phase s’inscrit au lendemain de la Seconde Guerre mondiale où l’économie de survie pousse Picasso à redoubler d’inventivité pour distraire Maya. Ces gestes témoignent non seulement de l’amour que portait le peintre à sa fille mais également d’une inventivité et d’une imagination sans égales lorsqu’il s’agit de renouer avec le thème l’enfance, central dans son œuvre.

MAYA POUR DÉCRIRE PABLO

En père aimant, Picasso entretenait donc une relation fusionnelle avec sa fille. Cette relation unique et privilégiée se traduit dans les œuvres du peintre par la représentation de scènes intimes et la tendresse transmise dans ses dessins. L’exposition met en avant cet amour particulier, et les portraits que peint Picasso de sa fille sont un moyen, pour lui, de montrer et déployer l’étendue de ses talents. Ces portraits évoquent la spontanéité et la naïveté propres à l’enfance, symbolisés par des traits simples et concis, des couleurs vives en aplat et la représentation de jouets dans les mains de sa fille.

“AVEC SA FILLE, PICASSO RENOUE AVEC LE THÈME DE L’ENFANCE, CHER À SON ŒUVRE.”

Crédits Photo : Vue d’exposition, Musée Picasso Paris.

FILLE DE PABLO… ET DE MARIE-THÉRÈSE WALTER

Autre figure du cercle familial, Marie Thérèse Walter, la mère de Maya Ruiz. Picasso s’attache aussi à montrer le lien familial qui les unit tous les trois. Dans ses peintures, mère et filles se confondent, Maya prend les traits de Marie-Thérèse, et est représentée comme un mélange entre Picasso et sa mère. Malgré la ressemblance, le peintre veille à faire transparaître la singularité de sa fille, en mettant l’accent sur le caractère à la fois déterminé et enjoué de Maya.

Si Maya participe au jaillissement créatif de Picasso, sa mère est aussi une muse pour l’artiste. Toutes deux inspirent tellement l’artiste qu’elles sont parfois présentes dans d’autres œuvres, de manière cryptique et cachée – la liaison entre le peintre et Marie-Thérèse Walter étant, à l’origine, secrète. 

Les femmes sont muses, épouses ou maîtresses du peintre. Elles désinhibent sa force créative, et Maya en est la témoin. Marie-Thérèse Walter ou encore Dora Maar, sont peintres, elles aussi. Les photographies réalisées par Edward Quinn exposées en fin d’exposition témoignent de cette époque et d’un Picasso entouré par de nombreuses femmes. Elles entrent et sortent de la vie de l’artiste tandis que Maya, elle, reste. Elle est précieuse et préservée. Une exception pour l’artiste, aujourd’hui rattrapé par des travaux de recherches qui ternissent sa réputation et réhabilitent plusieurs témoignages de son entourage rapportant des comportements jugés sexistes ou abusifs, envers les femmes et ses proches.

Si l’exposition permet d’avoir un accès privilégié à Picasso en tant que père de famille, elle est d’ailleurs un moyen pour Maya de renouer avec son père. En 1955, elle vient d’achever à ses côtés le tournage d’un documentaire, « Le mystère Picasso » réalisé par Henri-Georges Clouzot. Mais alors qu’elle lui annonce son mariage, le père rompt avec sa fille. Ils ne renoueront plus après cela. Picasso projette sa vie sur ses toiles comme les pages d’un journal intime. Son lien père-fille ne fait pas exception. Comme un dernier coup de pinceau, l’exposition du Musée Picasso-Paris, en cours jusqu’au 31 décembre, prolonge donc, à titre posthume, les confessions de l’artiste. 

Picasso projette sa vie sur ses toiles comme les pages d’un journal intime. Son lien père-fille ne fait pas exception. Crédits Photo : Vue d’exposition, Musée Picasso Paris.

La Perle

Exposition “Maya Ruiz-Picasso, fille de Pablo”
Du 16 avril au 31 décembre 2022
Musée national Picasso-Paris
5 rue de Thorigny, 75003 Paris
www.museepicassoparis.fr
Instagram : @museepicassoparis