Stéphane de Groodt sème le doute 

Un léger doute de Stéphane de Groodt, se joue jusqu’au 7 janvier 2024 au Théâtre de la Renaissance. Sous couvert de comédie, cette pièce tente de répondre à la question existentielle des comédiens : que reste-t-il d’eux lorsqu’il n’y a plus de public ?

Stéphane de Groodt met en scène une pièce dans la pièce, floutant les lignes entre comédiens, public, et personnages. Crédits photo : Fabienne Rappeneau

Le rideau se lève, les comédiens saluent, le rideau se baisse, le public applaudit. Fin de pièce ? Pas vraiment. Dès le début de sa comédie Un léger doute, Stéphane de Groodt sème le trouble dans le public du Théâtre de la Renaissance. Il met en scène une pièce dans la pièce, floutant ainsi les lignes entre comédiens, public, et personnages. Une mise en abyme qui fait se poser le problème des frontières entre réalité et fiction. 

DU GRAND DE GROODT

Dans Un léger doute, Stéphane de Groodt, acteur et personnage, débarque sur scène, cherchant ses clés à la fin du spectacle qu’il vient de jouer. Il y trouve sa femme, stupéfaite, qui tente discrètement de lui rappeler que la pièce est en train de se jouer. Tout de suite, l’ambiguïté s’installe. Lui, est persuadé que tout est terminé, qu’il n’y a plus personne dans le public et qu’il peut rentrer chez lui. Elle, panique et veut absolument continuer. Qui a raison ?

Cette ambiguïté est véhiculée par le genre même de la pièce. Stéphane de Groodt fait le choix de l’absurde. La pièce exprime la contradiction d’un système par le fait, puisque les comédiens jouent (ou ne jouent pas) une pièce devant un public (ou une salle vide). 

On reconnaît alors la plume de l’auteur qui signe sa première pièce en alliant comique, écriture littéraire et jeu de mots. Auteur du livre Voyage en absurdie, Stéphane de Groodt cultive une fois de plus sa fascination pour les mots, la littérature et l’humour décalé.

Crédits photo : Fabienne Rappeneau

« on ne sait plus si les quatre comédiens jouent ou s’ils sont eux-mêmes. »

JE DOUTE DONC JE SUIS

Dans cette pièce, quatre comédiens, dont on ne sait plus vraiment s’ils jouent, s’ils sont eux-mêmes ou si leur personnage est inspiré de leur propre personnalité. Quatre comédiens : Stéphane De Groodt, Éric Elmosnino, Constance Dollé, Bérangère McNeese, dont on cite les prénoms sur scène, pour davantage flouter les bornes entre réalité et fiction, entre incarnant et incarné.

Ce lien entre comédien et personnage est préservé par la conservation de certains traits de caractère en dehors des moments joués. Sur scène, les acteurs prolongent les doutes, les questionnements et les émotions de leur personnage. C’est ce basculement incessant entre réalité, jeu et mise en scène, accentué par la mise en abyme, qui entraîne le spectateur dans une suite d’incertitudes, sans jamais le perdre.

La pièce soulève, l’air de rien, des questions importantes, voire existentielles, sur fond de comédie, de rires et de jeu de mots. Les thématiques du temps qui passe, de l’existence du présent, de l’illusion, de la mort et de la vérité sont abordées, sans jamais trop s’y attarder. Le pari est tenu et permet de faire germer, chez le spectateur, une véritable réflexion, sans pour autant virer au drame. 

La mise en abyme, entraîne le spectateur dans une suite d’incertitudes, sans jamais le perdre. Crédits photo : Fabienne Rappeneau

Stéphane de Groodt tente, à travers cette pièce, de répondre à un questionnement universel : Qu’est-ce qu’un acteur ? Existe-t-il vraiment en dehors de la scène et surtout, du regard du public ? Qu’advient-il de lui lorsque personne n’est là pour l’applaudir ? Des questions presque philosophiques qui nous orientent progressivement vers celle du du regard de l’Autre sur soi.

Cette pièce nous fait entrer dans la tête de son auteur, nous entraînant dans un tourbillon déroutant entre réalité et fiction. Un léger doute interpelle sur le rôle et la place du comédien par rapport à son public et questionne la notion de vérité et de réel. Du côté du spectateur comme du comédien, on ne sait plus vraiment quoi penser ni à quoi se fier. Un léger doute, donc.

Armelle Sauger

La Perle

« Un léger doute »
Du 27 septembre 2023 au 07 janvier 2024

Théâtre de la Renaissance
20 boulevard Saint-Martin 75010 Paris

www.theatredelarenaissance.com
Instagram : @theatredelarenaissanceparis