« The Loop » : vortex hilarant au théâtre des Béliers

En mixologue théâtral aguerri, Robin Goupil revient avec une comédie  policière parodique,
loufoque à souhait. Ou comment se dilater l’esprit de rire, en toute  légèreté

Douglas et Carrie mènent leur interrogatoire avec une seule question : Mike est-il le coupable qu’ils recherchent ? Crédits : B.Buchmann-Cotterot

Substitut parfait  pour redonner de l’éclat à cette rentrée morose, The Loop, la nouvelle pièce de Robin Goupil s’affiche au  théâtre des Béliers, après avoir réjoui les spectateurs du festival d’Avignon, en juillet 2024. Un succès qui s’explique par un scénario aussi foutraque qu’original et qui ne perd jamais de vue son objectif : faire rire. 

Au commencement, il y a un meurtre. Sale affaire, très sale affaire. Ce n’est pas Douglas et Carrie, les deux flics chargés de l’enquête qui diront le contraire. Mais alors que tout accuse  Mike, le fils du maire Mitchel, Justine Beaver, l’avocate véreuse de la famille, n’a pas l’intention d’en rester là…

La théorie du chaos

Sans conteste, l’ingéniosité de cette pièce ne repose pas sur son histoire. Le twist est tout autre. En guise de teaser déguisé, le titre en annonce d’ailleurs la teneur. Car The Loop (“la boucle” en français) est avant tout le scénario d’une scène qui se répète. En boucle. 

Une fois, deux fois, trois fois, Douglas et Carrie mènent leur interrogatoire avec pour fil rouge, une seule et même  question : Mike est-il le coupable qu’ils recherchent ? Et alors que la boucle se répète, des modifications infimes du script initial se produisent…jusqu’à rendre totalement imprévisible l’issue de leur enquête

Théorie du chaos ou effet papillon, Robin Goupil s’empare avec malice de ce concept pour  dérouler un florilège de situations hilarantes aux tournures cocasses et ubuesques. Une partition  réhaussée par un quatuor de comédiens (Stanislas Perrin, Juliette Damy, Tristan Cottin et  Aurélie Boquien Basset) à l’énergie éclaboussante et dont le potentiel comique s’enrichit d’une belle maîtrise technique. Si bien que tant que la boucle n’est pas bouclée, difficile de savoir jusqu’où ceux-là peuvent aller ! À l’image de son précédent spectacle No Limit, Robin Goupil semble ici n’en avoir aucune. 

La troupe traque le rire

Si la pièce mérite le détour, c’est avant tout pour la richesse de son texte, petite bombe de  punchlines et de jeux de mots bien sentis. Robin Goupil maîtrise le ping-pong de répliques mieux que les Frères Lebrun en discipline olympique. 

Un humour décalé mais toujours assumé qui tire son efficacité des références qu’il convoque sur un tempo endiablé. Parodie des Feux de l’Amour, hommage à la comédie musicale Hellzapoppin, délire version Monty Python ou les Nuls, The Loop mélange les genres et traque le rire, sans répit.

Nous voilà prisonniers consentants d’une mécanique au déroulé implacable. Crédits : B.Buchmann-Cotterot

Et le pari est réussi. Oscillant sans cesse entre le premier et le dixième degré, les dialogues fusent, les rires s’y répercutent, le public en redemande. De quoi abreuver les quatre comédiens d’une ardeur intarissable, terriblement communicative. 

Et si d’aventure, certains spectateurs continueraient de résister : patience. La dernière boucle temporelle, point culminant de cette escalade farfelue, est faite pour ne laisser aucun rire sur le bas-côté. Victoire par KO  humoristique.  

Maniant nombre de procédés comiques avec brio, Robin Goupil offre un moment théâtral résolument divertissant. A la croisée d’inspirations clairement identifiables, The Loop  réussit ainsi le pari de faire pleurer de rire un public d’horizons divers, prisonniers consentants d’une mécanique au déroulé implacable. 

Amandine Violé

La Perle

“The Loop” de Robin Goupil
Du 27 août au 10 novembre 2024

Théâtre des Béliers
14 bis rue Sainte Isaure 75018 Paris 

www.theatredesbeliersparisiens.com
Instagram : @theatredesbéliers