À la galerie Gagosian,  l’âme des quartiers sud de Los Angeles

Originaire de Los Angeles, Lauren Halsey est exposée pour la seconde fois en France, à la galerie Gagosian. Une occasion unique de découvrir ses compositions XXL : derrière leur aspect complètement déluré, elles célèbrent la richesse culturelle des quartiers sud de Los Angeles, en proie à la gentrification.

On peut qualifier son travail d’installation immersive, tant il y a de micro-scénettes à observer. Crédits photo : Thomas Lannes

FANTAISIE URBAINE

En entrant à la galerie Gagosian, les œuvres de Lauren Halsey s’imposent littéralement à nous ; elles sont tout simplement gigantesques, avec des dimensions allant parfois jusqu’à 3 mètres de haut et de large. Mais plus que leurs volumes colossaux, c’est le travail d’accumulation qui est ici impressionnant. Dans un assemblage très dense d’objets trouvés dans son quartier natal de South Central, l’artiste nous ouvre les portes des communautés marginalisées de Los Angeles.

À travers chaque recoin, chaque détail, Lauren Halsey rend hommage à la force et à la beauté de ces quartiers sud. On peut qualifier son travail d’installation immersive, tant il y a de micro-scénettes à observer. Ici et là, les collages photos d’habitants, de bâtiments et de stars afro-américaines se mêlent à des panneaux publicitaires, des palmiers, des graffitis ou encore des rajouts de cheveux et des voitures miniatures.

Les compositions y sont volontairement très colorées, l’artiste ne lésinant pas sur les éléments fluos ou pailletés. Une palette vive et audacieuse à laquelle vient s’ajouter des éléments afro-futuristes, notamment avec une imagerie reliée à l’Égypte Ancienne, très présente dans chacune de ses œuvres.

En intégrant les symboles de cette civilisation, connue pour sa grandeur et sa puissance, Lauren Halsey élargit les horizons de sa pratique tout en engageant un dialogue avec l’Histoire, la culture et l’identité. En tant qu’artiste afro-américaine, elle cherche à réaffirmer les liens culturels et historiques entre l’Afrique et sa propre communauté.

« Dans un assemblage très dense, l’artiste nous ouvre les portes des communautés marginalisées de Los Angeles »

Crédits photo : Lucie Vial-Blondeau

UN TRAVAIL DE MÉMOIRE

Dans cette expérience artistique captivante, Lauren Halsey nous parle des luttes et des triomphes des quartiers marginalisés de Los Angeles. Elle promeut l’économie locale, les institutions et le militantisme du quartier de South Central, à travers une variété de références iconographiques tirées du quotidien. À l’intérieur de ces compositions denses émergent des icônes noires et queer telles que Curtis Mayfield, Aretha Franklin et Stevie Wonder, affirmant ainsi la diversité de la communauté qu’elle célèbre.

Le travail de Lauren Halsey nous amène à nous plonger dans l’histoire de ce quartier emblématique mais controversé de Los Angeles. Depuis les années 1960, South Central a souffert d’une désindustrialisation et d’un déclin économique, pour connaître plus tard les guerres de gangs et la violence urbaine, ce qui a contribué à stigmatiser le quartier. Malgré ces tensions, South Central est également le berceau de nombreuses expressions culturelles importantes, notamment dans les domaines de la musique, de l’art et de la littérature. D’importants efforts communautaires visent à revitaliser le quartier et à lutter contre la violence et la pauvreté.

Dans son travail, Lauren Halsey mêle volontairement pratique artistique et engagement politique. Crédits photo : Thomas Lannes

Mais un autre défi, plus insidieux, est apparu ces dernières années, celui de la gentrification. Avec son emplacement stratégique et son prix de l’immobilier abordable, South Central est dans le viseur de nombreux investisseurs, ce qui risque d’impacter profondément la culture locale et les habitants, qui pour beaucoup, n’auront plus les revenus suffisants pour rester.

Dans son travail, Lauren Halsey célèbre la mémoire et la richesse culturelle de ce quartier, et mêle volontairement pratique artistique et engagement politique. En tant qu’artiste et activiste, elle utilise son travail pour sensibiliser aux effets néfastes de la gentrification et pour défendre les droits des résidents historiques de ces quartiers.

Lauren Halsey participera cette année à « Stranieri Ovunque – Foreigners Everywhere », avec un commissariat d’Adriano Pedrosa, lors de la 60ème Biennale de Venise, du 20 avril au 24 novembre 2024. Par ailleurs, la Serpentine à Londres organisera la première exposition personnelle du travail de Lauren Halsey au Royaume-Uni, du 4 octobre 2024 au 5 janvier 2025.

Lucie Vial-Blondeau

La Perle

Exposition Lauren Halsey
Du 21 mars au 25 mai 2024

Galerie Gagosian
4 rue de Ponthieu 75008 Paris

gagosian.com
Instagram : @gagosian