ROMY, LIBERTÉ À TOUT PRIX :
Oser, travailler, essayer, réessayer, partir, contrer le sort, s’échapper… Tant de mots à définir une vie, une vie dans la lumière, puis éteinte dans une obscurité troublante… Une vie faite de Christine et de Rosalie, de Marianne et de Sissi, d’Hélène, d’Anna ou de Lilly, en une, celle de Romy. Romy Schneider. Icône du cinéma français, l’actrice fait l’objet d’une rétrospective événement à la Cinémathèque.
A peine sortis de l’ascenseur, nos yeux sont immédiatement attrapés par ceux de Romy Schneider. Un face-à-face percutant. L’actrice, assise devant son bureau, tourne la tête afin de regarder derrière elle. Un regard normalement adressé à Michel Piccoli, dans une scène des Choses de la vie. A cet instant, pourtant, il semble n’être destiné qu’à nos yeux ébahis. On comprend pourquoi l’actrice fût la personnalité la plus photographiée de son époque. Quelques minutes à rester sous le charme, puis, nous pouvons entamer notre parcours. On se balade d’abord au gré des photos et extraits du film Sissi – réalisé par Ernst Marischka, en 1955 – le long d’un couloir retraçant les débuts de sa carrière. Un couloir étroit : tel le carcan de jeune fille sage dans lequel l’ont plongée ses premiers rôles. Et qui dit carcan dit entrave à briser. Liberté à trouver.
L’actrice quitte l’Allemagne pour la France, tandis que nous laissons notre couloir exigu pour entrer dans une salle immense. Une pièce peinte de rouge et parsemée de toutes sortes d’objets, photos, enregistrements, lettres et costumes… Au cœur des milles vies de Romy Schneider après son premier vrai pas vers sa quête de liberté. Alors d’étapes en étapes, on la suit, l’admirant tout entreprendre au fil de ses projets. Apprendre le Français, s’essayer au théâtre, partir aux États-Unis, revenir en Allemagne, puis repasser par la France…
« Je fonce, on verra bien » semble murmurer Romy Schneider au travers de tous ces souvenirs et sourires capturés. Et nous fonçons avec elle. On tentera de s’y retrouver, voguant de salle en salle, d’année en année, au gré des couleurs et des différents états d’âme de cette femme passionnée. Cette femme qui a tout osé, connu l’obscurité et le feux des projecteurs. Cette femme moderne avant l’heure, qui toujours laissera quelques mystères planer, mais qui prouve, que le bonheur ou la liberté, c’est comme le reste : ça se travaille.
“LE CARCAN DE JEUNE FILLE SAGE DANS LESQUELS LA PLONGE SES PREMIERS RÔLES, VA RAPIDEMENT VOLER EN ÉCLATS.”
Sisi – Ernst Marischka – 1955
DES RENCONTRES DÉCISIVES
Mais cette quête a un prix. Être libre, ça se paye et se mérite. Il est peu dire que le parcours de l’actrice fût sinueux. Fait d’efforts, de ruptures, d’échecs, d’arrachements et de tristesses passagères – ponctué de grandes victoires.
Au fil des archives et des différentes pièces de l’exposition, une particularité nous apparaît clairement. Tout au long de sa vie et de sa carrière, c’est aussi son art de la rencontre, qui a su la guider : Alain Delon, Coco Chanel, Luchino Visconti, les trois personnes qui la feront se sentir française. Puis Alain Cavalier, Orson Welles, Claude Sautet… Autant de rendez-vous qui l’ont accompagnée, aidée, supportée au gré des années. Les amis de Romy ne sont jamais loin. Et ce, malgré son appétit pour l’ailleurs. Peut-être avait-elle compris qu’en fin de compte, la liberté se trouvait ici : auprès des gens qui l’aiment. À travers les témoignages de ceux qui ont assisté à l’ascension de l’actrice, ce n’est pas seulement sa soif de liberté qui est évoquée mais aussi sa conquête. « En réalité, j’étais simplement en avance sur mon temps. À une époque où il n’était encore nulle part question de libération de la femme, j’ai entrepris ma propre libération. J’ai forgé moi-même mon destin, et je ne le regrette pas. » confie-t-elle à son journal.
Romy Schneider meurt en 1982. Retrouvée morte dans sa chambre à l’âge de 43 ans, le mystère plane sur ses dernières heures. Un mystère dont la presse s’empare pour la planter en personnage tourmenté, mort de ses excès. Une thèse que ses proches réfutent encore aujourd’hui. Et son parcours plaide en sa faveur : Romy Schneider n’avait rien d’une chercheuse désespérée. C’était une rêveuse obstinée, une idéaliste rebelle, une échappée belle.