La Biennale Nemo : arts numériques, immersifs et engagés

L’immersion vaut le détour. L’exposition rassemble plusieurs artistes qui réinterprètent le réel grâce à la Biennale Némo. Leur ambition ? Témoigner du potentiel des arts numériques, révéler l’invisible, et provoquer la réflexion. Quand le numérique n’est plus qu’un simple outil...

Une oeuvre de Heather Dewey-Hagborg : La Biennale Nemo plonge dans les possibilités parfois glaçantes des nouvelles technologies. Crédit photo : Alexandra Foucher.

La Biennale Némo numérise à toutes les sauces. Installations, sculptures, dispositifs immersifs et interactifs, ou vidéos et photos, la Biennale des arts numériques matérialise l’imperceptible au Centquatre Paris. Les artistes cartographient notre univers, pour sensibiliser sur les enjeux de notre monde et créer de nouvelles formes esthétiques. Plongé au-delà de ses perceptions habituelles, le visiteur navigue alors entre science-fiction et travaux scientifiques de pointe.

Organisées en « ateliers », les pièces attisent la curiosité grâce à des titres mystérieux mais évocateurs : « La Terre en colère», « Vous n’êtes pas invisibles », « Natures dénaturées », ou encore « Le Bureau d’expertise des phénomènes invisibles ».

AU DÉPART DE LA PLANÈTE MARS

La visite commence par la traversée d’un kaléidoscope géant : l’œuvre Passengers de Guillaume Marmin. Le tunnel démultiplie les images pour donner à voir de nombreux points de vue. Le visiteur entre dans un monde dominé par les nouvelles technologies qui transforment notre quotidien, nos corps intimes et sociaux et nos esprits. On est ensuite dominé par une immense planète Mars – 7 mètres de diamètre – suspendue dans la Halle d’Aubervilliers. L’œuvre de Luke Jerram recréé fidèlement la planète rouge et invite à un voyage vers d’autres mondes. Changement d’époque et d’espace, l’exposition décloisonne les sujets, et la science dialogue avec l’art. 

“LE VISITEUR ENTRE DANS UN MONDE DOMINÉ PAR LES NOUVELLES TECHNOLOGIES QUI TRANSFORMENT NOTRE QUOTIDIEN.”

Nemo – Biennale internationale des arts numériques – Cent-Quatre Paris. Crédit photo : Alexandra Foucher.

IMAGES, DATAS ET NOUVELLES TECHNOLOGIES : UN CHARABIA ARTISTIQUE 

De nombreuses œuvres questionnent les nouvelles technologies, l’utilisation des données et la place des machines dans notre quotidien. Le visiteur peut, par exemple, s’amuser devant un petit lapin, réalisé avec la poussière résiduelle d’ordinateurs. L’animal matérialise 35 000 heures de travail de dix salariés d’une entreprise d’informatique. Impressionnant.

Quant à Permanent Data, installation de Jeroen van Loon, elle présente une grande bobine de câble de fibre optique de 12 kilomètres. Y sont imprimées l’intégralité de la Bible de Gutenberg, et des commentaires Youtube sur les pertes de données. On peut alors s’interroger sur la durabilité de l’information numérique. Tout sauf intemporelle. Dans ce contexte, The Nemesis Machine de Stanza, nous plonge dans une ville miniature captivante, composée de matériels informatiques et questionnant la taille de l’humain face à celle des réseaux technologiques.

Mais la technologie, c’est aussi un sujet sociologique : Heather Dewey-Hagborg a matérialisé tous les visages possibles de Chelsea Manning – ancienne analyste militaire condamnée pour avoir révélée des exactions de l’armée américaine – générés par algorithme à partir d’échantillons de son ADN. L’installation met en évidence la multiplicité d’interprétations, pour une réflexion sur la pertinence du décodage d’ADN et des notions d’identité biologique.

L’ARTISTE : UN LANCEUR D’ALERTE EN FAVEUR DE L’ÉCOLOGIE

L’écologie et le traitement infligé par l’homme à la nature sont également abordés dans l’exposition. Ainsi, Earthworks nous propose d’observer les formes d’ondes fluctuantes des activités sismiques, volcaniques, glacières et humaines. Le dispositif scientifique d’étude de la planète se transforme en une œuvre colorée et fascinante. De même, l’installation Eden de Paul Duncombe présente une végétation soumise à différentes pollutions humaines. Le constat est sans appel : les végétaux sont pour la plupart en très mauvaise forme… S’agit-il d’un récit d’anticipation ou d’un aperçu de notre avenir ?

Mais la Biennale ce n’est pas que cela. Bien d’autres œuvres sont à découvrir. En plus de cette exposition, l’événement se tient dans seize villes, 30 lieux de spectacles, et ne compte pas moins de 170 projets artistiques. Les spectateurs peuvent assister à des concerts, expositions, spectacles et performances en Région Ile-de-France, associant arts… et technologies, bien sûr.

La Perle

Nemo – Biennale internationale des arts numériques
 Du 9 octobre au 9 janvier 2022
Cent-Quatre Paris
5 rue Curial 75019 Paris
Direction artistique : José-Manuel Gonçalves et Gilles Alvarez