Lumière sur la FIAC

Néons, LEDs et lumières, la Foire internationale d’art contemporain 2019 semble trancher une part savoureuse aux œuvres lumineuses.

Contamination (Japanese) – Max Hooper Schneider – 2019. Crédit photo : Perla Msika.

Il est toujours difficile – pour ne pas dire impossible – d’évoquer, en quelques mots seulement, à quoi ressemble la Foire Internationale d’Art Contemporain (FIAC). Trop d’artistes, trop de monde, trop de choix, trop de bruit… Difficile, pourtant, de ne rien en dire du tout. À rendez-vous incontournable, article indispensable.

J’ai donc décidé, par souci de synthèse – et parce qu’une fois la curiosité éveillée, mes lecteurs pourront éventuellement se décider à dépenser le douloureux tarif d’entrée – d’orienter ma visite autour d’un type d’œuvres bien spécifique. Des idées ? A la lumière de votre lecture, vous trouverez peut-être la réponse. 

Quel bonheur de retrouver, grandiose et insubmersible, la nef forgée du Grand Palais ! Sous sa coupole, l’agitation des galeries convient à l’euphorie qui me gagne : pour la toute première fois, j’entre, un badge de presse à la main. 

Dans ce dédale contemporain, où le lèche-vitrine culturel est d’occasion, des points de repères me sont nécessaires. Et par choix, purement arbitraire, les œuvres qui m’attirent ont quelque chose de similaire. 

L’évènement n’a de français que le lieu. Dans un Babel légèrement déconcertant, j’entend parler art, affaires et côtes d’artistes. A sight to behold, pensé par Brigitte Kowanz, justifie le débat, au sein de la galerie viennoise Krinzinger : traversés par un néon éponyme, des miroirs montés en cube valent littéralement le coup d’œil. Qu’ils attirent d’ailleurs. Placée en première ligne, l’œuvre fait comme clignotant : œuvre à regarder, artistes à débaucher.

Mais dans cet espace cerné par une pesante concurrence artistique, mieux vaut rester prudent – ou du moins superstitieux. Contre le mauvais œil, la Galerie Templon compte sur Iván Navarro : d’une lumineuse main de Fatma, aux lettres colorées, il opère comme un gri-gri auprès de son exposant, lui souhaitant ainsi la bonne Fortune (V). 

Pour mettre la chance de son côté, d’autres encore, ont recours aux amulettes plus traditionnelles. Et puisqu’entre Paris et Bruxelles, il n’y véritablement qu’un pas, j’entre chez Michel Rein : on dit que le fer, métal impénétrable, protège du malheur. Avec son God save the hobby horse, Stefan Nikolaev rajoute une couche de protection au métal en l’enserrant de néons tricolores. Le concept est très vendeur : devant ce fer, moins rustique qu’esthétique, artisanat et marketing font bonne enseigne. 

Dans le genre catchphrase, Douglas Gordon ne se défend pas mal non plus. Grâce à son galeriste Kamel Mennour, il rassure le visiteur d’une réplique aseptisée : you won’t feel a thing i won’t feel a thing. Phrase courte, phrase simple, typographie modeste, l’artiste marque, blanc sur blanc, couleur néon d’hôpital, la peur de l’autre dans une société purgée de tout contact. Paradoxe d’une FIAC noire de monde… 

On croit en avoir fini avec l’art-société. Puis, ça nous revient : quand il y a Kamel Mennour, Neïl Beloufa n’est pas loin. Douce attention que ses Big Flowers E qu’il nous offre : mais joli bouquet illuminé cache cadeau empoisonné. Dans cet assortiment sauvage, se trouve, certains de nos emballages. Oui, le temps est au recyclage… 

Je quitte enfin l’agitation du Grand Palais. Ouf ! Un peu d’air pour digérer la Foire. En face, le Petit Palais proclame, sous les mots de Sylvie Fleury Yes to all. Une façon très subtile d’attirer le visiteur vers la FIAC Projects, en total libre accès. Une trentaine d’œuvres et de sculptures présentées au Petit Palais pour faire dialoguer création et patrimoine. Là où l’art contemporain se mêlent aux collections permanentes plus classiques, l’heure n’est plus aux « m’as-tu vu » très frenchy mais à la flânerie de dandy. 

Tout y est pour nous divertir : Ring d’escargot, chevalier des jardins, armée de mocassins… Le Musée des Beaux Arts de Paris croule sous un joyeux bazar. Max Hooper Schneider, heureusement, vient apaiser cet éternel divertissement : éclairée au néon, sa nature artificielle soumet le spectateur à la Contamination ; si bien qu’infectés par le virus, on signe, volontiers, pour une prochaine FIAC aussi talentueuse. 

Perla Msika

La Perle

Foire Internationale d’Art Contemporain (FIAC)
du 17 au 20 octobre 2019
RMN – Grand Palais
Avenue Winston Churchill, 75008 Paris