Les amis, les vrais amis, ce sont ceux qui restent. Après « Mon ami, Louis », « Couple et Veillée de famille », Gilles Gaston-Dreyfus, auteur, comédien et metteur en scène, nous offre une nouvelle épopée au cœur de relations les plus intimes : « A la vie à la mort » actuellement au Théâtre du Rond-Point est l’histoire de trois amis à qui il ne reste plus qu’eux. Un sujet fort traité avec beaucoup de délicatesse mais pas assez de vraisemblance. On peine à croire en cette amitié. Avec Anne Benoît, Stéphane de Groodt et Gilles Gaston-Dreyfus.
UNE AMITIÉ PEU CONVAINCANTE
« A la vie à la mort » : Telle est la réplique d’Hélène à ses deux amis, Paul et Joseph, après avoir enterré son dernier parent. Ces trois-là se connaissent depuis des décennies. En cette période de la vie si étrange où tous les deuils parentaux ont eu lieu, c’est pour eux, l’heure du bilan. Les trois amis marchent, pleurent, se consolent, se taquinent et parlent. Car c’est ce que sont les amis : des oreilles qui nous écoutent et des lèvres qui nous répondent.
Nous sommes alors en pleine campagne. Du cimetière à la maison d’Hélène, les trois amis entament donc une balade en pleine forêt. La scénographie est simple et épurée : un écran en arrière-plan, et un banc fait de pierres. Dans ce décor minimaliste, le jeu des comédiens est mis en avant.Mais celui-ci ne suffit pas à nous emmener dans le monde des personnages.
Nous voilà donc pris dans un dialogue entre nos trois compères, se rappelant les bons souvenirs, se souciant de l’avenir. On retrouve parfois des anecdotes et confessions qui nous font sourire, tant elles nous sont familières… mais sans aller jusqu’au rire, sève des amitiés qui durent. Ces moments-là sont effleurés, touchés du doigt, comme si on n’osait pas s’y plonger pleinement. Résultat : leur amitié ne franchit jamais le seuil de leur complicité.
“Leur amitié ne franchit jamais le seuil de leur complicité.”
De gauche à droite : Stéphane de Groodt, Gilles Gaston-Dreyfus et Anne Benoît. Crédit photo : Jean Croc.
TROIS ÉLECTRONS LIBRES
Complicité et spontanéité : voilà ce qui manque à Hélène, Paul et Joseph. Car si les mots sont parfois justes et les anecdotes bien choisies, le jeu dans sa globalité est survolé et la relation entre les personnages commentée. A l’image de cette réplique titre, répétée une dizaine de fois… « A la vie, à la mort », les personnages racontent davantage leur amitié qu’ils ne la vivent.
Nous regretterons alors cette amitié flottante et lointaine, tant on aimerait en saisir la moelle, l’essence. Certes, les trois comédiens dévoilent leur art oratoire et leur présence scénique, mais demeurent comme trois électrons libres, cherchant leur noyau. Celui des amitiés solides, où tous les filtres sont abolis et les silences choisis. Dans une pièce sur l’amitié, la sincérité aurait été plus appréciée que de belles paroles grandiloquentes.