« Toute l’histoire de la peinture en moins de deux heures » est un spectacle pédagogique animé par l’historien et critique d’art Hector Obalk, sur la scène du théâtre de l’Atelier en compagnie d’un musicien. À l’aide d’un mur d’images haute définition présentant près de 4 000 œuvres, le critique présente l’histoire de la peinture, ponctuée par un humour piquant et de la musique classique.
De Giotto (peintre primitif Italien – 1266-1337) à Yves Klein (peintre moderne Français – 1928-1962), Hector Obalk nous apprend à apprécier un artiste pour ce qui fait sa singularité. Il partage également son opinion, différente des critiques institutionnelles plus communes. Cette conférence ludique d’un nouveau genre désacralise les chefs-d’œuvre pour inviter à un nouveau regard critique.
RIRE, APPRENDRE, REDÉCOUVRIR L’ART
Historien d’art, Hector Obalk a été, entre autres, réalisateur de la série documentaire « Grand-art » d’Arte, chroniqueur dans l’émission « Rive droite, rive gauche » ainsi qu’au journal ELLE, et auteur de plusieurs ouvrages. Avec ce spectacle inédit, il est désormais un show-man drôle et pédagogique.
Entre stand-up et conférence, ce spectacle est d’abord une leçon d’Histoire de l’art accessible à tous. Grâce à sa mosaïque de chefs-d’œuvre par ordre chronologique– animée par Morwenn Augrand – Hector Obalk invite le spectateur à faire « comme un Martien », en observant les couleurs qui distinguent chaque courant artistique. Par exemple, chez les primitifs italiens, on constate une prédominance des fonds or, en raison de la non-maîtrise des techniques de perspective. On fait également bien la différence entre les couleurs sombres des peintres hollandais du XVe siècle, l’atmosphère onirique des maniéristes du siècle suivant, le clair-obscur du XVIIe siècle, les effets pastel des impressionnistes du XIXe, et les couleurs tranchées des artistes du XXe siècle.
Hector Obalk zoome ensuite sur une quinzaine de tableaux, en soulignant la patte des artistes. S’il critique parfois la technique ou le respect des proportions, l’historien sait souligner la beauté de chaque œuvre et le talent des artistes. On ne peut que deviner l’immense travail d’analyse réalisé pour faire cette sélection. Les explications sont ponctuées d’anecdotes inhabituelles et de traits d’humour efficaces qui rendent le spectacle captivant. Si l’on apprend, on rit également beaucoup.
Quelques intermèdes musicaux de Raphaël Perraud au violoncelle laissent au spectateur le temps d’apprécier les œuvres sur lesquelles il porte désormais un nouveau regard. Seul bémol : une brève apparition de la chanteuse Andréa Constantin ne sert en rien le spectacle, bien qu’elle soit une chanteuse de talent.
Après 1h45 de show, le pari est réussi : on ressort avec l’impression d’avoir appris à regarder, et une envie d’en apprendre encore plus.
“LES EXPLICATIONS SONT PONCTUÉES D’ANECDOTES INHABITUELLES ET DE TRAITS D’HUMOUR EFFICACES QUI RENDENT LE SPECTACLE CAPTIVANT.”
Crédit photo : Alexandra Foucher.
UNE CRITIQUE DE L’ART HORS DES SENTIERS BATTUS
Outre les explications éclairantes, la richesse de ce spectacle réside dans la désacralisation de l’art réalisée par Obalk. « Culture légitime » par excellence – terme désigné par Pierre Bourdieu regroupant les oeuvres socialement définies comme supérieures aux yeux de tous, type La Joconde –, les tableaux habituellement sacralisés dans des musées sont descendus de leur piédestal. Avec son humour, son opinion tranchée et son attention aux détails parfois incohérents, le critique rend les œuvres accessibles à tous. L’historien d’art dépasse la réserve muséale habituelle et libère le regard, de sorte que chacun puisse assumer son propre point de vue. La culture sort de son musée au bénéfice d’uneréappréciation nécessaire. En prime, on se rend au théâtre pour voir autre chose que du théâtre !
La mise en scène générale est d’ailleurs très simple, centrée sur les tableaux. Dépouillées de leurs décors, les œuvres s’offrent à notre regard, qui peut alors les apprécier dans leurs imperfections, singularités et beauté. Un spectacle familial adapté à tous les âges, et aux experts comme aux non-initiés.
La représentation existe en deux versions différentes et complémentaires (A et B) qui analysent différents artistes. Il est donc possible d’aller la voir deux fois, et ça, c’est une bonne nouvelle.
À la fin de son spectacle, Obalk s’interroge sur le devenir de la peinture après l’art abstrait. Et si l’avenir résidait justement dans cette accessibilité de la culture à tous, dont il est indéniablement l’un des artisans ?